L’ART DE LA POURSUITE PAR ÉQUIPES – Cycling Canada Cyclisme

L’ART DE LA POURSUITE PAR ÉQUIPES

Par Emily Wood, scientifique du sport à l’Institut canadien du sport de l’Ontario

Je sais que je suis peut-être un peu biaisée, mais j’adore la poursuite par équipes. Depuis les 5,5 dernières années, je travaille en étroite collaboration avec nos équipes féminine et masculine de poursuite par équipes et c’est un événement qui m’a complètement captivée.

Deux équipes qui s’affrontent et qui tentent de se rattraper sur deux côtés opposés de la piste au fur et à mesure que la course progresse. L’avance peut s’échanger à chaque tour. Les deux équipes travaillent pour garder le rythme et roulent à quelques millimètres de la roue de leur coéquipier. Un coureur se retire de l’avant avec précision et rejoint l’arrière de la formation. Ça peut vraiment être un spectacle passionnant et magnifique.

Pour une personne non expérimentée, ça peut sembler assez simple: il suffit de rouler plus vite que vos adversaires. Mais il y a un art à la poursuite par équipes – en fait, c’est tout sauf simple. Et c’est ce que j’aime de cette épreuve. C’est très complexe et il y a un équilibre extrêmement fin entre l’entraînement, la course, la récupération et la préparation afin de garantir une solide équipe de coureurs parfaitement synchronisés.

Les exigences physiologiques de la poursuite par équipes sont incroyablement intenses, si bien que chaque coureur est à sa limite absolue lorsqu’il franchit la ligne d’arrivée. L’événement représente un défi tout à fait unique dans le sport de haute performance car il existe un lien étroit entre la physiologie aérobie et anaérobie. Les athlètes aux profils physiologiques très différents ont une chance de bien réussir dans cet événement, tout dépendant des différents rôles et stratégies qui sont choisis. Par exemple, le travail de la position 1 (meneur) est d’accélérer l’équipe jusqu’à la vitesse souhaitée. Cet athlète doit donc avoir une plus grande capacité anaérobie que le reste de l’équipe, alors que la position 4 termine généralement l’épreuve pour l’équipe et reste plus longtemps à l’avant. Ce type d’athlète serait généralement plus « aérobie » avec un seuil plus élevé. Les stratégies et tactiques de course dépendent grandement de la composition de l’équipe et il est essentiel de connaître les forces et les faiblesses de chaque coureur.

En plus de performer à la limite de leurs capacités physiques, les exigences techniques sont également très élevées. L’équipe doit être extrêmement disciplinée et travailler de manière cohérente pour atteindre le rythme prévu. Des différences de seulement 0,1 seconde par tour peuvent avoir un impact significatif sur le rythme de la course – si l’équipe va trop vite, elle pourrait exploser avant la fin. Les athlètes doivent également exécuter des échanges avec une précision absolue, surtout lorsqu’ils se retirent de l’avant et rejoignent l’arrière de la formation, à seulement quelques millimètres de la roue de la personne devant, tout cela en roulant à des vitesses de près de 65 km/h (chez les hommes).

Je suis fascinée par l’histoire et l’évolution de la poursuite par équipes. Le sport a considérablement changé, en particulier lors du dernier cycle olympique, où l’accent a été mis sur la science et la technologie. J’ai analysé des milliers et des milliers de poursuites par équipes au fil des années et nous sommes maintenant en mesure d’optimiser les performances comme jamais auparavant. Nous nous entraînons dans un vélodrome avec un système de chronométrage sophistiqué qui nous permet de produire des rapports détaillés sur chaque entraînement. Chaque vélo de piste a un capteur de puissance qui capture les données de chaque coup de pédale, et nous utilisons ces informations, ainsi que des séquences vidéo, pour analyser chaque performance. Nous analysons également nos adversaires à l’aide de vidéos d’anciennes compétitions afin d’analyser les tendances de nos principaux rivaux en matière de rythme, de vitesse et de stratégies pour nous assurer de garder une longueur d’avance. Alors que les poursuites par équipes deviennent de plus en plus rapides, il y a eu des changements majeurs au cours des dernières années en matière de stratégies, de choix de braquets et d’aérodynamique. Il y a des quantités infinies de données à portée de main qui ont un impact sur nos méthodologies d’entraînement, nos stratégies et notre équipement lors de courses, et nous repoussons constamment les limites de la performance humaine.

Pourtant, malgré tout cela, tout revient à l’exécution de l’équipe le jour de la course. Des années de préparation et finalement tout revient à 4 km de course. On peut avoir toute la science et la préparation nécessaire, mais le secret réside dans l’équilibre entre tous ces aspects. Quand tout se passe bien, c’est vraiment le plus beau spectacle qui soit.